Affaire Ary Abittan : 3 ans et demi de procédure avant un non-lieu

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Un non-lieu, mais pas un acquittement. L’humoriste Ary Abittan a vu l’une de ses représentations perturbée par un collectif féministe ce samedi 6 décembre. En cause, les accusations de viol dont l’homme de 51 ans a fait l’objet en 2021 et pour lesquelles un non-lieu a été rendu en avril 2024, confirmé en appel en janvier. Aux yeux de la justice, aucun procès n’a eu lieu, mais l’affaire est close.

Quel est le point de départ de l’affaire ?

L’humoriste à l’affiche de « Coco » et « Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu ? » a été placé en garde à vue le 31 octobre 2021 à Paris après le dépôt d’une plainte pour viol par l’une de ses connaissances. Une jeune femme de 23 ans l’accusait alors d’une relation sexuelle non consentie et violente, lors de laquelle elle affirmait avoir été sodomisée de force, alors qu’elle avait exprimé plusieurs fois son refus.

Les faits auraient eu lieu au domicile du comédien, dans le VIIIe arrondissement, non loin des Champs-Élysées. Les deux amants se fréquentaient de manière épisodique après s’être rencontrés lors d’un événement dans un hôtel un mois auparavant. Le soir des faits dénoncés, ils avaient eu alors un premier rapport sexuel consenti et protégé au cours duquel Ary Abittan sollicitait de pratiquer une sodomie, ce que la jeune femme aurait refusé. L’acteur n’aurait alors pas insisté.

Ils dînaient ensuite ensemble et avaient un second rapport sexuel consenti et protégé. Toutefois, au cours de cette nouvelle relation sexuelle, le comédien aurait pénétré analement la jeune femme sans solliciter son autorisation. Selon la version de plaignante, elle aurait alors crié et son amant se serait retiré avant de poursuivre le rapport sexuel différemment.

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L’acteur a-t-il été poursuivi par la justice à la suite de cette plainte ?

À la suite de 48 heures de garde à vue, l’ancien chauffeur de taxi avait été mis en examen et placé sous contrôle judiciaire le 2 novembre 2021. Il avait toujours nié les faits, mais les juges s’appuyaient sur plusieurs messages de la plaignante qui évoquaient des faits de violence lors du rapport sexuel incriminé. Il s’était alors mis en retrait de la vie publique.

Par ailleurs, le témoignage d’une amie de la plaignante faisait état de la détresse de la jeune femme après les faits. Des éléments que semblaient corroborer les expertises médico-légales décrivant des lésions au niveau génital et anal. De plus, comme nous l’avions révélé, la présence de sang sur la serviette de bain saisie au domicile d’Ary Abittan accréditait le fait d’un rapport sexuel violent.

Que s’est-il passé à la suite de sa mise en examen ?

De nouveaux éléments ont été portés au dossier. Ils ont entraîné en juillet 2023 l’annulation de la mise en examen d’Ary Abittan, au profit d’un placement sous le statut de témoin assisté, plus favorable. Ce statut vise une personne nommément mise en cause dans une enquête pénale, ou sur laquelle pèsent des indices qui rendent vraisemblable sa participation à la commission d’une infraction.

Si les juges avaient reconnu le caractère « indiscutable » de l’état de stress post-traumatique de la jeune femme, ils avaient également établi que les éléments réunis au cours de l’information judiciaire étaient de nature à « affaiblir la valeur probatoire des indices initialement retenus pour motiver la mise en examen d’Ary Abittan ».

Quelle a été la décision finale rendue par la justice ?

Un non-lieu a été prononcé par la justice le 3 avril 2024. « Cette ordonnance de non-lieu intervient à l’issue d’une enquête menée par deux juges d’instruction. Il y a eu de nombreuses auditions, expertises, interrogatoires. Rien n’a été laissé de côté », avait alors souligné Caroline Toby, avocate de l’acteur. La plaignante avait alors fait appel de cette décision par la voix de son avocate. Mais l’ultime décision de justice, rendue le 30 janvier, avait confirmé le non-lieu pour le comédien.

« La justice a considéré qu’Ary Abittan est innocent, après une instruction de plus de trois ans. Les sept magistrats qui ont eu à statuer sur ce dossier sont unanimes. Désormais, il n’y a aucune place au doute sur l’innocence de mon client », s’était félicitée Caroline Toby. Cependant, un non-lieu ne signifie pas un acquittement de la personne au sens où la justice la déclare innocente après examen des faits lors d’un procès. Dans ce cas précis, il a été retenu qu’il n’y avait pas assez d’éléments pour permettre la mise en examen du comédien quinquagénaire. Il reste donc présumé innocent des faits qui lui ont été reprochés.

Après ces accusations contre lui, le comédien avait quitté son quartier des Champs-Élysées et s’était réfugié à la campagne. Ary Abittan était en plein tournage d’une série pour M 6 et s’apprêtait à remonter sur scène pour son nouveau one man show quand il a vu sa carrière brutalement suspendue. Il avait été écarté de la fiction de M 6 « L’homme de nos vies » alors qu’il devait interpréter un homme qui séduisait les femmes pour les escroquer.

Comment s’est déroulé son retour sur scène ?

Ary Abittan est remonté pour la première fois sur scène en mai 2024, à la suite de l’ordonnance de non-lieu rendue à son égard, avec un nouveau spectacle baptisé « Authentique ». Depuis le non-lieu définitif prononcé en janvier 2025, il avait annoncé un retour sur les planches dans le courant de l’année. Il s’est notamment produit aux Folies Bergère à Paris début décembre. L’une de ses représentations a été perturbée par plusieurs membres du collectif « Nous Toutes Paris Nord ».

« Quatre militantes » sont intervenues aux alentours de 20 heures, équipées d’un masque à l’effigie d’Ary Abittan où la mention « violeur » figurait sur le front. « Ary Abittan violeur », ont également scandé les activistes féministes, avant d’être évacuées par la sécurité et huées par le public.

Le collectif Nous Toutes rappelle qu’« un non-lieu n’est pas un acquittement, c’est juste la fin des poursuites ». « Nous Toutes refuse de voir se dérouler la réintégration médiatique et professionnelle d’un homme qui est accusé de viol », ajoute le collectif. Des militantes féministes s’étaient déjà opposées à un spectacle d’Ary Abittan dans un théâtre de la ville de Tours, en taguant la façade du lieu. L’humoriste doit poursuivre dans les prochaines semaines sa tournée avec des dates prévues jusqu’en décembre 2026.

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