Après 60 ans, sept femmes sur dix connaîtront treize ans de veuvage en moyenne

il y a 2 day 4

La perte du conjoint n’est plus un simple accident de la fin de vie. Elle est devenue, pour une grande partie des femmes, une véritable tranche de vie, souvent longue, marquée par l’isolement et une fragilisation économique durable.

Le veuvage n’est plus seulement un moment de la fin de vie: il en occupe désormais une large part. En France, sept femmes sur dix vivant en couple à 60 ans connaîtront un jour la perte de leur conjoint. Et pour celles qui y seront confrontées, la durée moyenne du veuvage atteint treize ans, selon une étude de l’Ined publiée ce mois. Autrement dit, près de la moitié du temps qu’il leur reste à vivre après 60 ans se déroule aujourd’hui sans conjoint.

Cette réalité est déjà bien visible. En 2020, près d’une femme de plus de 60 ans sur trois était veuve en France, et cette proportion dépasse une sur deux après 75 ans. À l’inverse, les hommes restent majoritairement en couple jusqu’à un âge avancé: seuls deux sur dix ont le statut de veuf au moment de leur décès.

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Le veuvage, une expérience majoritairement féminine du grand âge

Ce déséquilibre tient à trois raisons structurelles. D’abord, les hommes meurent plus tôt que les femmes: l’écart d’espérance de vie reste marqué. Ensuite, les couples demeurent caractérisés par un différentiel d’âge persistant, l’homme étant en moyenne plus âgé que sa compagne. Enfin, après un veuvage, les trajectoires divergent: les hommes se remarient plus fréquemment, tandis que les femmes restent, le plus souvent, durablement seules.

L’étude met également en lumière une fracture sociale. Les femmes issues des foyers les plus modestes restent veuves en moyenne 14,1 ans, contre 11,4 ans pour les plus aisées. Plus encore, pour les veuves pauvres, le veuvage représente 57 % du temps qu’il leur reste à vivre après 60 ans, contre 38 % pour les plus riches. Autrement dit, plus on est pauvre, plus on vieillit seule, et longtemps, au moment même où les ressources diminuent.

L’Ined pointe aussi un angle mort statistique qui entoure encore le veuvage. On dispose toutefois de repères issus notamment de la Cnav. En 2024, les pensions de réversion ont représenté 38,7 milliards d’euros, soit 1,3 % du PIB. Mais ce dispositif ne protège que les couples mariés. Or les générations qui arrivent aujourd’hui à l’âge de la retraite ont beaucoup plus souvent vécu en union libre ou en PACS, sans accès automatique à cette protection financière.

La durée du veuvage devrait reculer dans les décennies à venir, sans pour autant traduire une réelle embellie. Selon les projections, elle passerait autour de 11 ans en 2070, sous l’effet du resserrement de l’écart d’espérance de vie entre femmes et hommes. Mais cette baisse s’accompagne d’un renversement discret : la part des couples où la femme décède avant son conjoint augmenterait, passant d’un tiers aujourd’hui à 36 % en 2070.

Avec une durée moyenne estimée à 12,7 ans, la France se situe dans une position intermédiaire en Europe. Le veuvage est plus court dans les pays nordiques, autour de 11 ans, et plus long dans les pays baltes et en Europe de l’Est, où il peut atteindre 14 ans, dans des régions marquées par une forte surmortalité masculine.

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