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Après plusieurs années de corrections et de réparations sur le miroir principal et les panneaux solaires de Hubble – qui depuis son lancement en 1990 produisait des clichés désespérément flous – c’est avec cette image désormais célèbre que la Nasa et l’Esa ont annoncé que le télescope était enfin pleinement fonctionnel. Cette vue d’une région de formation d’étoiles dans la nébuleuse de l’Aigle était spectaculaire, très différente des représentations habituelles du cosmos.
Hubble a en effet été l’un des tout premiers télescopes à être équipés d’une caméra numérique CCD. Cela avait constitué un pari risqué dans les années 1970, alors que les films et plaques photographiques étaient encore courants et que l’avenir de la photographie semblait appartenir aux tubes cathodiques.
Particulièrement colorée et contrastée, cette image a été préparée à partir des données du télescope spatial par un jeune astronome, Jeff Hester, de l’université d’État de l’Arizona, qui a ajouté différents filtres afin de détecter la présence de gaz lumineux dans la nébuleuse. Car le lancement de Hubble a aussi coïncidé avec une accélération du développement de logiciels de traitement d’images – la version 1.0 de Photoshop a été lancée la même année que le télescope spatial.
Cette image d'une région de formation d'étoiles dans la nébuleuse de l'Aigle, les Piliers de la Création, est l'un des premiers clichés spectaculaires du télescope spatial Hubble. Acquisition par une caméra numérique CCD, puis application de filtres. 1995.
© Nasa, ESA, Hubble Heritage Team (STScJ/Aura)Ce style d’« images en couleurs de l’Univers, à haut impact esthétique et scientifiquement exactes », comme Jeff Hester et ses collègues les ont décrites, a rencontré un succès tel qu’il a été largement repris, par exemple par le télescope James-Webb, lancé en 2021. Les astronomes et les agences spatiales ont pris conscience du soutien public que de telles représentations pouvaient susciter pour leurs coûteuses entreprises, et de l’intérêt par conséquent d’inclure dans l’espace restreint de leurs appareils des imageurs pourvoyeurs de visualisations spectaculaires.
En la nommant les Piliers de la Création, ses inventeurs ont encouragé une lecture métaphysique de cette image, alors que dès sa diffusion son esthétique était rapprochée des sublimes photographies et tableaux du XIXe siècle représentant l’Ouest américain. On y a perçu un écho contemporain de ces évocations visuelles de la conquête de nouvelles frontières à la fois géographiques et technologiques.

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