JO 2028 : le formidable défi paralympique de Sandra Laoura

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Sur le podium en ski de bosses aux Jeux d’hiver 2006 avant qu’un accident ne brise sa carrière, la Française ambitionne de devenir la première médaillée olympienne à participer aux Jeux paralympiques, en cyclisme sur route.

«C’est un projet très important à mes yeux. Depuis que j’ai repris la pratique sportive, le goût de l’effort est revenu. Je suis attirée par cette sensation, cette adrénaline-là. Elle me fait me sentir vivante aujourd’hui. J’ai vraiment à cœur de continuer cette aventure et cela sera l’occasion de terminer mon histoire d’athlète de haut niveau.» Les larmes aux yeux, dans un café du 10e arrondissement réservé pour l’occasion, Sandra Laoura ne cherche pas à cacher l’émotion qui l’étreint. Près de vingt ans après être devenue la première médaillée olympique française en ski de bosses – lorsqu’elle décrocha du bronze à Turin en 2006 –, près de 19 ans après le terrible accident survenu lors d’un entraînement au Québec qui la priva de l’usage de ses jambes, la jeune femme de 45 ans a officialisé son intention de participer à ceux de… Los Angeles en 2028.

Devant quelques journalistes et des proches venus pour lui apporter son soutien, Laoura est revenue, avec pudeur, sur son parcours de vie, de la petite jeune fille née à Constantine, en Algérie, et débarquée à deux ans en France, du côté de la Plagne où elle a appris à découvrir, et aimer, l’univers des sports d’hiver. Au point de devenir l’une de ses plus belles représentantes, dans une discipline, le ski de bosses, dont elle est tombée amoureuse en assistant au sacre olympique d’un certain Edgar Grospiron à Albertville en 1992. Une vocation est née. Mais elle aura dû arpenter quelques chemins de traverse avant d’accomplir son rêve. Comme celui la contraignant d’attendre ses 18 ans pour obtenir la nationalité française, afin de prendre part pleinement au circuit international. Où elle ne tarde pas à briller.

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Un déclic aux Jeux de Paris 2024

8e des Jeux de Salt Lake City en 2002, elle a pris date pour, quatre ans plus tard, réaliser son rêve de podium. À 26 ans, l’avenir lui appartient. Avant que le sort ne la fauche en pleine ascension lors d’un entraînement où elle est victime d’une lourde chute sur le dos, qui la laisse avec deux vertèbres fracturées et sans aucune sensation dans les jambes. Résiliente, la «freestyleuse» se bat, effectue quelques pas à l’aide d’un équipement adapté, donne tout pour pouvoir remarcher un jour. Avant de se résoudre à l’évidence, cruelle, de ce fauteuil roulant devenu son compagnon de déplacement. Se reconstruire lui demande alors du temps, du soutien, qui ne manque pas. Consultante pour certains médias, intervenante en entreprises, elle prend ensuite son envol au sein du CNOSF, puis du comité d’organisation des Jeux de Paris 2024. Jamais très éloignée du monde du sport. Mais de l’autre côté de la barrière. Sans savoir encore qu’elle allait replonger…

Lors de ces JO 2024, la Plagnarde s’immerge dans un univers, les paralympiques, dont elle ignorait tout, ou presque, à quelques amitiés près développées aux Étoiles du Sport ou dans le cadre de sa nouvelle vie professionnelle. Et comme Grospiron en 1992, elle y trouve un déclic, en assistant à une compétition de natation dans le bassin de La Défense Arena. Là, dans l’eau, le Brésilien Gabriel Dos Santos Araujo, rebaptisé Gabrielzinho, décroche trois titres sur le 200m nage libre, le 50 et 100m dos. Sans bras et avec des jambes atrophiées. «Si lui peut le faire, si lui a un tel courage, pourquoi pas moi ?» : telle est la pensée qui traverse l’esprit d’une Laoura toujours en quête de nouveau défi. À commencer par le plan sportif. «J’ai été arrêtée et freinée dans ma carrière alors que je voulais la continuer. Et puis là, j’ai la chance de refaire du sport et de clôturer ma carrière d’une certaine façon. Il m’a fallu beaucoup de temps, mais maintenant, je suis prête à vivre cette nouvelle aventure.»

Il y a ce vent, quand vous skiez, qui tape un petit peu les joues ou qui les frôle. Sur le vélo, j’ai retrouvé cela.

Sandra Laoura

Restait à la jeune femme de choisir dans quelle discipline viser les Jeux paralympiques de Los Angeles. Dans sa réflexion, entre en compte le fait d’une pratique en extérieur et une quête de sensations passées à retrouver. D’où son choix de se tourner vers le cyclisme sur route et le handbike. «C’est une sensation très particulière», décrit celle qui a posé pour la première fois ses fesses dedans le 8 mars dernier. «Effectivement, on est vraiment au ras du sol. Mais j’ai vite retrouvé cette sensation d’air que l’on reçoit ou que l’on va chercher quand on roule ou quand on skie. Il y a ce vent, quand vous skiez, qui tape un petit peu les joues ou qui les frôle. Sur le vélo, j’ai retrouvé cela.» Et donc très rapidement, à ses yeux, cela a été le handbike ou rien. «Non, je n’ai pas essayé d’autres sports. J’ai juste réfléchi concernant la natation, mais finalement, cela me va très bien d’en faire pour ma réathlétisation, mais aller compter les carreaux plusieurs heures par jour… Et puis je ne suis pas très aquatique non plus.»

Sandra Laoura Leïla Gammouh

Si pour l’instant elle ne sait pas encore à quel moment elle pourrait prendre part à sa première compétition, Laoura se réjouit que son projet ait été bien accueilli au sein de la Fédération de paracyclisme. «Ils ont été plutôt encourageants en me disant qu’il y avait de la place pour tout le monde. Ça ne va pas être simple parce que c’est du sport de haut niveau et de la performance, mais la porte est ouverte et il faut que je gravisse chaque échelon pour pouvoir m’approcher de leur niveau. Mais j’ai hâte de faire face à cette concurrence, qui va me pousser encore de l’avant.» Tout comme elle a hâte de mettre en place ses séances d’entraînement où elle invitera ceux qui le souhaitent de se joindre à elle. Car son projet, bien qu’éminemment personnel, la Française de 45 ans l’imagine collectif pour prendre tout son sens, et toute sa valeur. Avec cette pensée, qui l’a toujours animée depuis son accident de la vie : «Si je peux changer la vie ne serait-ce que d’une personne, en lui montrant que c’est possible de refaire du sport, alors j’aurais gagné.»

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