L’eau de l’usine d’andouilles de Vire dans le Calvados bientôt réutilisée… pour fabriquer du béton !

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Du béton à l’andouille, cela coulerait-il de source ? « Notre objectif, avec le projet Re-Use, c’est de cesser de pomper dans les forages pour la fabrication de béton », se projette Romain Legrand, responsable production Basse-Normandie du fabricant de béton Cemex. Dans ce scénario, l’eau proviendra de l’usine d’andouilles Amand-Bianic, juste à côté. En ce mois de décembre, les porteurs du projet Re-Use ont présenté les premiers résultats d’une machine permettant de réutiliser les eaux usées du site pour les besoins de son voisin.

La sécheresse comme révélateur

Un tournant qui s’est amorcé en 2022, en pleine sécheresse dans le bassin virois. « Un territoire qui ne garde que les eaux de surface », rappelle Nicole Desmottes, la maire de Vire-Normandie. Sans pluie, le bocage tire alors la langue et les industriels de l’agroalimentaire se mettent au diapason en traquant les fuites, en cherchant à réduire la longueur des tuyaux employés et en développant des machines en circuit fermé. « Depuis, nous avons baissé notre consommation d’eau de 15 %, tout en produisant 260 tonnes d’andouilles et d’andouillettes en plus », souligne Maxime Mouriaux, directeur industriel Est du groupe Popy, dont fait partie Amand-Bianic.

Maxime Mouriaux, directeur du site virois à l’époque, songeait déjà à compléter son arsenal en envoyant ses eaux usées retraitées aux bétons Cemex. « Je pensais qu’on construirait un pipeline et que ça se ferait facilement », sourit-il. Erreur. Même si Amand-Bianic possède sa propre station de traitement, les eaux ne sont pas compatibles avec la fabrication de béton. En cause, notamment, une trop grande quantité de sel qui nuirait aux bétons armés. Trop de résidus de produits nettoyants, aussi, et des odeurs… Le béton à l’andouille ne jouissant du même succès gustatif qu’un pain à l’andouille typiquement virois.

Un enjeu de taille

L’école d’ingénieurs Builders et l’entreprise Scienteama (soutenus par la région Normandie à hauteur d’environ 260 000 euros) se penchent alors sur un dispositif capable de purifier l’eau. Après deux ans de travail, les analyses sont prometteuses. L’obstacle du sel, qui inquiétait beaucoup le fabricant de béton, est levé. Romain Legrand, de Cemex, s’approche d’un bloc de béton témoin. « Il sent plus le béton que l’andouille » sourit-il. « Reste encore à résoudre définitivement la problématique des odeurs, éclaire Benoît Agnus, président de Scienteama. Mais nous avons des solutions ».

Un brevet est en cours. De quoi envisager de passer à la phase suivante, à savoir développer une maquette de machine à poser à la sortie de l’usine et qui traitera de plus amples volumes d’eau. À terme, cette invention pourrait être industrialisée et commercialisée auprès de nombreuses entreprises pouvant optimiser la consommation d’eau.

L’enjeu est de taille : Cemex estime consommer 173 litres d’eau par mètre cube de béton, et produit en moyenne… 100 m cubes de béton par jour. Les eaux usées d’Amand pourraient subvenir à ces besoins grâce à cette machine de retraitement, même s’il faudra encore faire preuve de patience pour une mise au point sur des gros volumes d’eau.

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