Budget 2026 : face à Sébastien Lecornu, le PS cherche la bonne formule

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Dans l’incertitude parlementaire, l’Élysée observait jusqu’alors l’ultime haie budgétaire avec une pointe d’optimisme. "C’est certes compliqué, mais les socialistes ont d’abord dit qu’ils ne voteraient jamais en faveur du PLFSS…", sourit-on. Sauf que, cette fois-ci, le chemin pour doter l’État de son budget est plus qu’étroit.

En début de semaine, le Sénat a droitisé et adopté le texte que l’Assemblée nationale avait rejeté à l’unanimité, un mois plus tôt. La commission mixte paritaire (CMP), où la gauche est faiblement représentée, se tiendra ce vendredi, mais ses éventuelles conclusions laissent songeur à bâbord. "S’il y a 50 % de chances que la commission mixte paritaire soit conclusive, il y a 100 % de chances que ses conclusions soient rejetées par l’Assemblée", prédit Jérémie Iordanoff, député écologiste, peu soupçonneux de vouloir plonger le pays dans l’instabilité puisqu’il a voté en faveur du PLFSS. Le Rassemblement national, les insoumis et les écolos ont d’ores et déjà admis qu’ils voteraient contre. Quand bien même les socialistes s’abstenaient - ils excluent à nouveau de voter pour - le compte n’y serait toujours pas.

Ils cherchent la bonne formule

Embarqués dans un mano a mano avec Sébastien Lecornu, les socialistes cherchent, s’il en est, la bonne formule. Sous cape, les grilles de lecture divisent au sein du groupe parlementaire, comme depuis le début des débats budgétaires. Une fraction du groupe est exsangue de la politique de compromis, quand une autre opterait volontiers pour l’adoption d’un budget à tout prix - après tout, certains considèrent qu’ils en ont obtenu davantage dans l’opposition que s’ils avaient été aux manettes. Et une majorité demeure au milieu du guet. "La question pour nous n’est pas de choisir entre le fond et la responsabilité, affirme le député Laurent Baumel. Beaucoup en ont marre de cet inconfort, qui émane de cette tension permanente. Mais je plaide pour que l’on maintienne cette tension."

Enfin, le temps est une question cruciale. Pour que soient respectés les délais de la Constitution, les deux lois de finances doivent être promulguées avant le 31 décembre 2025, et le PLF doit être adopté le 23, au plus tard. Face aux perspectives d’une loi spéciale, et d’un prolongement des débats budgétaires en janvier, deux écoles s’affrontent, là encore.

"Lecornu a montré du respect pour le parlement", glisse Laurent Baumel, convaincu que le Premier ministre n’obligera pas les députés à adopter un budget avant Noël. Pour lui comme pour une partie de ses camarades, débattre en janvier n’est certes "pas génial", mais relève du moindre mal pour continuer de corriger un PLF plus qu’insatisfaisant. "Je ne vois pas comment on nettoie ce texte avec la règle de l’entonnoir", souffle-t-on en haut lieu socialiste. Philippe Brun ou François Hollande, eux, considèrent "qu’il faut passer la haie budgétaire le plus vite possible", afin de se projeter dans les prochaines échéances.

Le PS n'a pas perdu de points

À défaut d’en gagner, la séquence a selon eux permis au PS de ne pas perdre de points. C’est ainsi que le député de l’Eure a jusqu’au dernier moment appelé au "deal" en amont de la CMP, officialisé dans les conclusions de cette dernière, adoptées par voie de 49.3. Mais le temps presse, et la proposition semble avoir fait long feu, regardée avec méfiance par ses camarades et la direction du parti.

Notamment parce qu’Olivier Faure et Sébastien Lecornu ne souhaitent pas, pour l’heure, revenir sur la non-utilisation du 49.3. Le contraire risquerait d’anéantir le capital politique engrangé jusqu’alors par les deux hommes. Alors pourquoi ne pas songer aux "ordonnances négociées", comme révélé par Les Echos, qui assure que "le Conseil constitutionnel a été sondé" ? Des conclusions d’une CMP tombée d’accord, enrichies de quelques exigences socialistes, pourraient être adoptées par voie d’ordonnance. Mais le PS reste prudent. "Cette option relève de la brève de comptoir, au moment où nous nous parlons", affirme un cadre. Leurs partenaires voient la manœuvre d’un très mauvais œil : "Pour nous c’est non. Les ordonnances sont là pour garantir pour que les délais soient respectés, pas pour imposer un budget qui serait rejeté", dit Cyrielle Chatelain à L’Express.

"Cette hypothèse n’a jamais été discutée. Les ordonnances sont dans les mains du Premier ministre. Le véhicule ne relève pas de notre compétence, affirme un proche du premier secrétaire. Mais dans tous les cas, nous fonderons notre appréciation sur la copie finale". Une porte entrouverte, donc. Une voie contestée, et conditionnée à la réussite d’une commission mixte paritaire bien mal embarquée. La route est longue !

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