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En collaboration avec Véronique Kohn (psychologue et psychothérapeute spécialisée en relations amoureuses) et Delphine Py (Psychologue clinicienne)
Des amas de lumières, une quantité astronomique de nourriture, de l’artisanats à souhait et surtout un moment de partage, les marchés de Noël sont pour beaucoup un moment de joie en famille. Mais, est-ce vraiment le cas pour tout le monde ? Nous avons posé la question à deux psychologues.
Les marchés de Noël sont des lieux riches en couleurs, en odeurs, en goûts et en sons. De quoi stimuler nos cinq sens et nous faire plonger dans nos souvenirs d’enfance. Enfin, pour la plupart…
Une expérience festive et multisensorielle
Parce que Noël n’arrive qu’une fois par an, se préparer pour la célébration est un véritable processus qui commence plusieurs semaines avant le jour J. Et cela passe notamment par les marchés de Noël.
Des lieux où « l’on va voir l’artisanat comme on irait voir un musée », commente Véronique Kohn, psychologue spécialisée dans les relations amoureuses. Ces lieux mêlant lumières, couleurs, musiques, odeurs et goûts constituent une expérience multisensorielle pour tous les amoureux de la fête de Noël. C’est aussi le lieu où les limites habituelles sont plus souples que d’habitude.
« On s’autorise certains produits que l’on ne mange pas tous les jours, du foie gras, de la raclette, des plats d’hiver », activant un « circuit de la récompense », explique Delphine Py, psychologue clinicienne, spécialisée dans les troubles anxieux et dans les thérapies cognitivo-comportementales.
Le mythe de la famille unie
Les marchés de Noël, et la fête de Noël plus généralement, sont « une certaine forme de conditionnement », raconte Delphine Py. Tous nos sens sont activés, et cela fait appel à nos souvenirs d’enfance, ou du moins « à notre enfant intérieur ». Dans ce rêve, les marchés de Noël sont « un moment de partage, un moment pour se rassembler avec les membres de sa famille, où l’on se rappelle qu’on n’est pas tout seul », renchérit Véronique Kohn.
Dans un récit idéal, « c’est le moment où l’on vient flâner, passer un moment convivial où l’on met de côté les conflits et où l’on met en avant la générosité en prévoyant d’offrir des cadeaux ». Et « l’idée même d’offrir des cadeaux nous rend heureux. Nous sommes des êtres sociaux, nous aimons contribuer, faire plaisir aux autres est naturel ». L’atmosphère de Noël nous rendrait donc heureux, et même plus altruiste, encouragée par les souvenirs d’une famille unie.
Une réalité beaucoup moins joyeuse pour certains…
Mais, « de la même façon que ces souvenirs, cette nostalgie de la magie de Noël peuvent réactiver des souvenirs agréables, ils peuvent aussi activer des souvenirs désagréables », avance Delphine Py. Une famille n’est pas tout le temps un modèle de joie. Pour certains, la famille est plutôt synonyme de « conflits, de traumatismes, ou même carrément d’absence ».
Les marchés de Noël et la fête de Noël en général deviendraient donc plutôt « une fête du manquement », ajoute Véronique Kohn. « Si je n’ai pas de famille unie, les marchés de Noël peuvent devenir une source d’angoisse, un retour à la solitude ».
Les marchés de Noël créent aussi du stress et de l’anxiété
Même dans le cas où nous avons la chance de profiter de notre famille pendant les fêtes, les marchés de Noël restent une affaire difficile pour beaucoup. Certes, nous apprécions cette célébration et aimons l’idée de faire plaisir, mais cette anticipation est à double tranchant.
Elle peut également être une source de stress, notamment « pour ceux qui portent la charge mentale de l’organisation », affirme Delphine Py. D’ailleurs, la personne qui tient ce rôle est en général « la mère de famille », remarque la psychologue.
« Cela représente une certaine pression pour ces dernières qui prennent soins d’organiser les décorations, les cadeaux, le menu du réveillon, l’accueil et le logement de leur famille ». Un ensemble d’attentes de la société, une « injonction du bonheur » qui peut créer une certaine « dissonance » avec ce que la personne ressent véritablement à l’intérieur.
Les organisateurs.trices ne sont d’ailleurs pas les seuls à être surstimulé(e)s par les marchés de Noël. « Pour les personnes neuroatypiques, comme ceux qui sont sur le spectre de l’autisme, ces stimulations peuvent les rendre hypersensibles », rappelle la psychologue. « Les cloches, la musique, les lumières des marchés peuvent créer des troubles du comportement chez ces personnes ».
Et tout ça sans compter les personnes solitaires, les personnes qui refusent de contribuer à la société de surconsommation, et bien d’autres. Il existe une multitude de raison pour ne pas apprécier les fêtes de Noël et toute la préparation qui va avec.
En résumé, « on ne peut pas dire que les marchés de Noël rendent heureux tout le monde. C’est uniquement le cas pour ceux qui auraient des prédispositions à s’émerveiller grâce aux aspects jovial et esthétique, pour ceux qui sauraient faire appel à leur enfant intérieur et qui auraient la chance de partager cette fête avec leur famille », conclut Véronique Kohn.
Sources
Source 1 : Interviews avec Véronique Kohn, psychologue spécialisée dans les relations amoureuses le 5 décembre 2025 et avec Delphine Py, psychologue clinicienne spécialisée dans les troubles anxieux et dans les thérapies cognitivo-comportementales le 9 décembre 2025.

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