Sciences. Différents vaccins contre des maladies infectieuses protégeraient aussi d'autres pathologies. Une raison de plus de les promouvoir, affirme le Pr Alain Fischer.
Publié le 17/12/2025 à 06:00

Pédiatre et généticien, le Pr Alain Fischer a cofondé l'Institut Imagine. Il a également été président de l'Académie des sciences et est aujourd'hui professeur émérite au Collège de France.
JOEL SAGET / AFP
Une série de publications scientifiques récentes apporte des informations importantes sur l’intérêt des vaccins. Ces résultats sont souvent inattendus et pour certains à considérer encore avec prudence car préliminaires. Ces nouvelles sont bonnes et ne peuvent qu’inciter à une meilleure adhésion à la vaccination notamment des adultes.
En premier lieu, une étude française portant sur 28 millions de personnes âgées de 18 à 59 ans, non seulement confirme la protection contre le risque de décès par Covid, mais surtout montre que les personnes vaccinées ont moins de risque (25 %) de décéder et ce quelle qu’en soit la cause dans les quatre ans qui suivent. C’est une étude en tout point remarquable, la première d’une telle ampleur, qui démontre ainsi l’innocuité des vaccins à ARN messager sur le long terme, éliminant ainsi les balivernes proférées à l’égard de ces vaccins. La question intéressante est bien entendu celle du ou des mécanismes responsable de cette protection indirecte par la vaccination contre le Covid-19. L’hypothèse la plus probable consiste en une réduction des risques inhérents aux séquelles du Covid ou au Covid long, qui affectent environ 10 % des personnes infectées par le Sars-CoV-2 et exposent notamment à des complications cardiovasculaires. D’autres hypothèses ne peuvent être cependant exclues.
Cette étude fait écho avec le travail récemment publié de compilation des résultats de 155 études qui analysent la relation entre infections virales et risques de complications cardiovasculaires : infarctus du myocarde et accidents vasculaires cérébraux qui sont, rappelons-le la première cause de décès en France. Infections virales aiguës dont grippe et Covid, mais aussi infections virales chroniques dont HIV et hépatite prédisposent à ces complications cardiovasculaires. Ces données confirment l’effet protecteur connu de la vaccination contre la grippe sur la survenue dans les semaines suivant une grippe d’un infarctus du myocarde. Quelle est la relation entre infections et risque cardiovasculaire ? Il est plausible que la réponse immune provoquée par l’infection au niveau des vaisseaux sanguins et la libération de facteurs inflammatoires en soient la cause. En tous les cas, la conclusion est évidente : se vacciner protège son cœur et son cerveau.
Une politique de promotion de la vaccination
Plus étonnant encore, plusieurs travaux suggèrent que la vaccination contre le zona, fortement recommandée chez les personnes âgées de plus de 65 ans, pourrait réduire un peu le risque de démences, en particulier chez les femmes. Ces conclusions doivent être analysées prudemment du fait du caractère rétrospectif de ces études, toujours susceptibles de biais. Elles portent néanmoins sur des centaines de milliers de personnes et sont concordantes. La vaccination contre le virus respiratoire syncytial (responsable de bronchiolites) aurait le même effet. Fait troublant, ces deux vaccins utilisent le même adjuvant, ce qui suggère un effet de celui-ci. A contrario, la vaccination contre la grippe n’exerce pas d’effet protecteur, ce qui pourrait laisser penser que certains virus, capables d’infecter le système nerveux, comme le virus responsable de la varicelle et du zona sont impliqués dans la survenue de démences.
Et ce n’est pas tout, une étude également rétrospective et pour l’instant unique, nécessitant donc confirmation, relate un effet bénéfique de la vaccination par ARN messager contre le Covid sur l’efficacité de l’immunothérapie par anticorps facilitateurs des réponses immunes anticancer dans le traitement de certains cancers du poumon et de mélanomes. Il faut pour cela que la vaccination soit intervenue dans les 100 jours précédents l’immunothérapie. Le gain, de l’ordre de 20 % de survie avec trois ans de recul, n’est pas négligeable. Il est donc possible que la réponse inflammatoire déclenchée par la vaccination, notamment la production des interférons, rende compte de cet effet.
Même si plusieurs de ces travaux demandent confirmation, ils ne peuvent qu’inciter à mener une politique vigoureuse de promotion de la vaccination notamment des personnes âgées contre le Covid, la grippe, le virus respiratoire syncytial et le zona. En ces temps où l’on cherche à réduire le déficit de la caisse nationale d’assurance maladie, une telle politique de prévention s’impose !
Alain Fischer est professeur émérite au Collège de France et cofondateur de l’Institut des maladies génétiques (Imagine).

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