Il n’a pas vécu une enfance comme les autres. À l’âge de 8 ans, Matthias Lambert se rend compte qu’il n’a pas les mêmes capacités physiques que les autres enfants de son âge : « Mon corps ne pouvait pas exécuter ce que mon esprit voulait. Pendant un match de football interscolaire dans le Pas-de-Calais, je me suis rendu compte que j’avais des difficultés à courir et une incapacité à toucher le ballon. J’avais aussi plus de mal à marcher que les autres ». Des signaux qui alertent la famille.
Le diagnostic est posé et le petit garçon découvre qu’il souffre d’une myopathie. À l’âge de 15 ans, il visite les locaux du Téléthon. Un déclencheur pour sa carrière professionnelle : « Cette visite a révélé un profond contraste. Les médecins me disaient année après année que la maladie progressait et qu’il n’y avait rien à faire. Pour la première fois, j’avais des chercheurs qui m’ont dit ‘On va travailler sur ta myopathie et on va trouver un traitement’ ». Un discours porteur d’espoir qui a séduit Matthias Lambert et qui a orienté son désir de devenir chercheur pour lui aussi « sauver des vies » à son tour.
Mais le parcours a été semé d’embûches, Matthias Lambert s’est accroché et s’est donné les moyens de ses ambitions. « J’aurai pu abandonner mais j’avais une idée en tête et je me suis accroché à cette petite branche. J’ai énormément travaillé et j’ai utilisé mes capacités. Pendant mes années à l’université, les symptômes ont évolué. J’avais besoin d’un fauteuil roulant et d’une machine la nuit qui me maintenait en vie en me permettant de respirer ».
Et sa détermination a payé puisqu’il est devenu chercheur dans la prestigieuse université américaine d’Harvard. « Je n’avais pas le choix, c’était une façon pour moi de m’en sortir. Et après, j’ai voulu travailler sur les myopathies et sur ma propre maladie. C’est un peu égocentrique mais c’était aussi un moyen de sauver sa peau. Vous savez, quand vous avez un handicap, vous essayez de survivre au mieux. Et moi, c’est la recherche qui m’a raccroché à ça ».
Matthias Lambert a fait des découvertes sur les gènes de sa maladie mais, pour le moment, la recherche reste toujours à ses débuts. « Concernant ma myopathie, il n’y a pas grand-chose. Il y a cinq laboratoires dans le monde qui travaillent sur cette maladie, on est très loin d’un traitement. Mon travail de ces dernières années a permis de faire un bond dans la compréhension de ma maladie et de développer des outils permettant de mieux l’étudier. J’ai développé des modèles cellulaires ». En France, une petite centaine de patients souffrent de la même maladie.
Aujourd’hui, le chercheur de 35 ans a décidé de raconter son parcours atypique dans un livre. « Je n’aime pas parler d’exemple mais je me suis dit que d’autres personnes pouvaient se retrouver dans mon récit. J’espère que ça pourra aider d’autres personnes et leur montrer que même dans les moments difficiles il existe toujours une solution ». Et de compléter : « Je pense que le message de ce livre est universel. Je parle du handicap mais, au final, c’est parler de la différence. Je parle beaucoup du handicap comme une manière de faire les choses différemment plutôt que comme quelque chose de négatif pour la société. Dans notre société, on a besoin de cette différence ».
Le chercheur, qui travaille aujourd’hui aux Etats-Unis, met en avant l’importance de la recherche médicale : « La recherche sur les maladies peut servir à des pathologies plus communes comme le cancer, la DMLA ou l’atrophie musculaire. Je pense qu’écouter les personnes qui ont des activités différentes dont les personnes handicapées permettraient à tous de vivre mieux et en en meilleure santé ».
Matthias Lambert s’estime chanceux dans sa vie et fier de sa réussite professionnelle : « Dans la vie de tous les jours, j’aimerais que l’on me juge davantage sur mon métier que sur mon handicap. Je voudrais que l’on me voie comme ça, comme un chercheur avec des idées innovantes ».
Sources
Entretien avec Matthias Lambert réalisé le 11 décembre 2025

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