"L’un des rebondissements les plus spectaculaires à ce jour dans la campagne de pression militaire menée contre le dictateur vénézuélien Nicolas Maduro". Voici comment CNN résume la scène. Sur une vidéo publiée sur le compte X de la ministre de la Justice américaine Pam Bondi, partiellement floutée, on distingue des militaires américains descendant en rappel depuis un hélicoptère sur le pont d’un pétrolier. Quelques instants capturés au large du Venezuela, ce mercredi 10 décembre.
Donald trump, lui, a choisi l’emphase pour décrire cette séquence. "Nous venons tout juste de saisir un pétrolier au large du Venezuela, un grand pétrolier, très grand, le plus grand jamais saisi, en fait", a-t-il affirmé depuis la Maison-Blanche à des journalistes. Une escalade assumée, dénoncée aussitôt par Caracas comme un "acte de piraterie internationale".
La saisie autorisée par un juge fédéral
Selon Pam Bondi, qui a indiqué que l’opération avait notamment été menée par le FBI avec le soutien du ministère de la Défense, le navire intercepté en eaux internationales transportait du pétrole soumis à des sanctions en provenance du Venezuela et de l’Iran. "Il a été saisi pour de très bonnes raisons", a déclaré de son côté Donald Trump, sans donner de détails sur le navire, son propriétaire ou sa destination, mais précisant que les États-Unis comptaient garder la cargaison.
Si la saisie d’un bateau est assez inhabituelle, un juge fédéral avait bien autorisé cet acte, sous prétexte de liens présumés avec des groupes terroristes soutenus par Téhéran. L’opération, appuyée par les forces navales déployées dans les Caraïbes, est donc officiellement légale. Mais le choix de la mise en scène, la vidéo diffusée par Pam Bondi, et la déclaration triomphale de Donald Trump ne laissent guère de doute sur la portée politique de cet acte.
Today, the Federal Bureau of Investigation, Homeland Security Investigations, and the United States Coast Guard, with support from the Department of War, executed a seizure warrant for a crude oil tanker used to transport sanctioned oil from Venezuela and Iran. For multiple… pic.twitter.com/dNr0oAGl5x
— Attorney General Pamela Bondi (@AGPamBondi) December 10, 2025Deux responsables du Pentagone, consultés par le Wall Street Journal, ont souligné que cette saisie constituait un signal adressé aux autres pétroliers qui attendent de charger du pétrole brut vénézuélien. Les données de suivi maritime indiquent qu’une douzaine d’entre eux patientent au large, tandis que d’autres ont décidé de couper leurs transpondeurs pour éviter d’être détectés, d’après le média américain.
Caracas, de son côté, voit dans cette interception la preuve de la véritable motivation américaine. "Il ne s’agit pas de migration, de drogue, de démocratie ou de droits de l’homme", proteste le gouvernement. "Il s’agit de nos richesses naturelles." Le ministère des Affaires étrangères dénonce un "vol éhonté" et un acte "criminel" destiné à s’emparer du pétrole vénézuélien "sans verser la moindre contrepartie".
"Ce sont des assassins, des voleurs, des pirates. Comment s’appelle ce film, 'Pirates des Caraïbes' ? Eh bien, Jack Sparrow est un héros, ceux-là sont des criminels des mers, des flibustiers, ils ont toujours agi ainsi", a renchéri à la télévision Diosdado Cabello, le ministre vénézuélien de l’Intérieur.
Plus de 20 bateaux attaqués ces derniers mois
Le timing n’est pas anodin. Quelques heures avant l’arraisonnement, les États-Unis avaient exfiltré clandestinement la figure de l’opposition Maria Corina Machado à bord d’un bateau. Une opération clandestine qui a immédiatement ravivé les soupçons d’un durcissement américain à l’égard de Nicolas Maduro.
La saisie du pétrolier s’ajoute à une série de frappes menées ces derniers mois contre plus de vingt bateaux dans les Caraïbes et le Pacifique, que Washington présente comme des opérations contre des trafiquants de drogue. Mais ces actions, qui ont fait 87 morts, sont de plus en plus critiquées. Certains élus démocrates et défenseurs des droits humains évoquent des violations du droit international, voire un "crime de guerre" après une double frappe le 2 septembre, pour achever les survivants d’un premier bombardement. Le Venezuela n’étant pas une voie majeure de fentanyl vers les États-Unis, les justifications avancées par l’administration peinent à convaincre ses opposants.

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