Politique. Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale adopté mardi à l’Assemblée nationale contient entre autres la suspension de l’emblématique réforme des retraites. Après un dernier passage au Sénat, il devra revenir à l’Assemblée pour un ultime feu vert.
Publié le 10/12/2025 à 07:54

Annonce du résultat du vote sur le projet de budget de la Sécurité sociale pour 2026 à l'Assemblée nationale à Paris le 9 décembre 2025
afp.com/ALAIN JOCARD
Après 106 heures de débats et d’âpres négociations, c’est désormais chose faite. Les députés ont approuvé mardi 9 décembre, à une courte majorité (247 voix pour, 234 contre), le projet de budget de la Sécurité sociale à l’Assemblée nationale. Une décision aussitôt saluée par plusieurs membres du gouvernement, à commencer par la ministre des comptes publics, Amélie de Montchalin. "Pour la première fois depuis 2022, un texte financier, le projet de loi de financement de la sécurité sociale, est adopté sans 49-3. Un débat a eu lieu, un vote a eu lieu, et une majorité de compromis et de responsabilité s’est formée. Le compromis n’est pas un slogan : c’est ce qui permet d’avancer ici et maintenant sur l’essentiel malgré les différences", a-t-elle écrit sur X.
Pour autant, le marathon budgétaire est loin d’être terminé pour le gouvernement, qui a devant lui de nouvelles étapes à haut risque au Parlement avant le 31 décembre, pour faire adopter définitivement ce budget d’une part - lequel prévoit notamment la suspension de la réforme des retraites -, mais aussi pour faire adopter celui de l’Etat, qui s’annonce plus risqué.
Budget de la Sécu : aller-retour au Sénat
Si le Premier ministre Sébastien Lecornu peut se targuer d’une première victoire importante avec ce vote favorable du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), la partie n’est pas encore gagnée. Il ne s’agissait en effet que de la "nouvelle lecture", c’est-à-dire un deuxième passage devant les députés. Le texte doit désormais repartir au Sénat qui l’examinera dès ce mercredi en commission, et vendredi dans l’hémicycle. Le PLFSS reviendra enfin en "dernière lecture" à l’Assemblée, à une date encore incertaine. Les députés auront alors le dernier mot.
Une incertitude subsiste encore sur l’attitude des sénateurs : d’ordinaire dans cette situation, ils préfèrent rejeter d’emblée le texte pour acter leur désaccord. Mais plusieurs cadres de la chambre haute évoquent l’hypothèse d’un examen en bonne et due forme avec de nouvelles modifications. Lors de sa dernière lecture, l’Assemblée nationale peut en effet toujours reprendre certains amendements votés au Sénat : le texte final pourrait donc encore être légèrement modifié. Quoi qu’il arrive, le chef du gouvernement va encore retenir son souffle lors de l’ultime vote du PLFSS à l’Assemblée, qui s’annonce lui aussi serré.
Budget de l’Etat : loin d’être joué
En parallèle, les yeux vont rapidement se tourner vers le projet de loi de finances (PLF), le budget de l’Etat pour 2026, qui prévoit une trentaine de milliards d’euros d’économies et sur lequel le Parti socialiste a obtenu très peu de concessions gouvernementales à ce stade. C’est une autre paire de manches : en première lecture, son volet "recettes" a été rejeté à la quasi-unanimité par les députés, entraînant le rejet de l’ensemble du texte.
Le PLF est actuellement en phase d’examen au Sénat, avec un vote solennel prévu lundi 15 décembre à la chambre haute, qui l’a nettement fait pencher à droite. Sept députés et sept sénateurs tenteront ensuite de s’accorder sur une version de compromis de ce texte lors d’une commission mixte paritaire (CMP) quelques jours après. S’ils parviennent à un accord, le texte commun sera soumis pour un ultime vote des deux chambres le 23 décembre… Avec une incertitude majeure sur l’issue du scrutin à l’Assemblée, en l’absence de majorité.
Après l’adoption du budget de la Sécurité sociale, le gouvernement veut croire qu’une entente est également possible pour le PLF : "Se mettre d’accord sur l’essentiel, c’est ce que les Français attendent de nous. Et dès maintenant, nous devons travailler ensemble sur la suite : le projet de loi de finances. Parce que le pays ne peut pas attendre", a ainsi exhorté Amélie de Montchalin.
Loi spéciale ou 49.3 ?
De nombreux cadres politiques estiment qu’il sera beaucoup plus complexe d’aboutir à un vote favorable sur le PLF que sur le PLFSS, poussant certains d’entre eux à plaider pour le retour du 49.3 juste avant Noël. Sébastien Lecornu continue d’exclure cette hypothèse, qui l’exposerait sans doute à une motion de censure dans les derniers jours de décembre. En cas d’échec de la CMP, ou si le compromis de CMP est rejeté à l’Assemblée le 23 décembre, l’alternative serait le vote d’une loi spéciale avant le 31 décembre, et la reprise des discussions budgétaires début 2026.

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